Vivre le Carême: le jeûne, un exercice pénitentiel et de libération intérieure

           Le Carême nous invite au jeûne alimentaire, il est un commandement de l’Eglise de le vivre de manière totale le Mercredi des Cendres et le Vendredi Saint (sans mettre en danger sa vie, les enfants et les personnes âgés n’y sont pas tenus). Ce jeûne est à la fois un exercice pénitentiel et un exercice de libération. Pénitentiel car nous sommes invités à le vivre avec une contrition du cœur (regret d’avoir offensé Dieu car tout péché est une offense à Dieu, Catéchisme n°1850). Pénitentiel aussi car nous devons le vivre en nous mettant en communion spirituelle avec ceux qui ont faim, cela suscite notre charité qui va s’exprimer par l’aumône (le partage) donc par une bonne action, laquelle « couvre une multitude de péchés » (1P4,8).


           Le jeûne est aussi un exercice de libération. Le jeûne est une privation alimentaire, mais aussi de ce qui compte pour nous. En ce deuxième dimanche de Carême, nous sommes choqués que Dieu demande à Abraham de lui sacrifier son fils et de voir qu’Abraham obéit. Mais Abraham a la foi que si Dieu a été capable de lui donner un fils dans sa vieillesse, Il est capable de le ressusciter des morts ! Abraham sait qu’il doit tout à Dieu son Créateur et qu’il attend tout de Lui. Voyant la foi d’Abraham, Dieu épargne Isaac et fait Alliance avec Abraham. Ce dernier sort fortifié dans sa relation avec Dieu après avoir accepté de se priver de son fils en plaçant celui-ci à sa juste place : comme un don de Dieu. Nous pouvons y voir ici une forme de jeûne.


           Le temps du Carême est ce temps de libération par rapport à nos attachements humains pour que nous ne nous confions qu’en Dieu. Ces quarante jours représentent les quarante années passées au désert par le peuple Hébreux après sa libération d’Egypte par la Puissance de Dieu. Quarante ans parce qu’après la sortie d’Egypte le peuple n’a pas cru que Dieu pouvait le rendre vainqueur des Amorites qui habitaient la Terre Promise (Dt1) : le peuple comptait sur lui-même et non sur Dieu.


           Dans la liturgie nous vivons le jeûne en ne fleurissant pas l’autel ou le tabernacle. C’est une expression sensible du dépouillement, du jeûne que nous sommes appelés à vivre pendant le Carême. De même au cours de la messe nous ne chantons pas l’« Alléluia » (qui signifie « Louez le Seigneur ») ni le « Gloire à Dieu », qui tous deux expriment la joie alors que nous sommes dans un temps pénitentiel. Ce jeûne nous permettra ainsi de mieux les retrouver à Pâques. Cela évite aussi l’habitude. Le « Gloria » clôt la liturgie pénitentielle du début de la messe en action de grâce pour le pardon donné, c’est pourquoi c’est à lui que revient de clôturer le temps pénitentiel du carême lors de la Vigile Pascale.

Père Vianney Hême de Lacotte